La situation
On ne peut s'en débarrasser : l'enfant est tout le temps « dans vos jupes » ou « dans vos jambes ». Le vrai pot de colle, qui vous poursuit partout, en quête d'un bisou, d'un crayon, d'un câlin, ou d'autre chose.
La situation est simple : vous craquez !
Qu'il vous aime, très bien, mais pas au point de vous entraver à ce point dans votre existence. Généralement, c'est la mère, plus présente qui en fait les frais, le père étant souvent moins sollicité. D'où cette phrase habituelle « va demander à ton père ».
Ce qui se passe dans sa tête
De 2 à 6 ans, l'enfant a besoin qu'on s'occupe de lui, ce n'est pas plus compliqué que cela. Or, c'est souvent durant cette période que vient un nouvel enfant dans la maison, ou à l'inverse que les « grands » demandent plus d'attention. D'où une indisponibilité manifeste des parents. Mais ce n'est pas la seule explication, car les enfants unique, non concernés par la situation précédente, demandent également beaucoup à leurs parents.
Ce qu'ils demandent en fait, c'est une reconnaissance, non de leur existence en tant « qu'être », mais de leur existence en tant que « faire ». "Regarde mon dessin, aide-moi à faire ceci ou cela, viens voir comme je joue bien au ballon , etc. ". Cette période de la découverte de l'activité mérite bien un minimum de reconnaissance et d'intérêt de votre part, et bien entendu, c'est tout de suite, et pas dans 5 mn ! D'où des colères , des conflits, et une exaspération bien compréhensible de votre part.
L'interprétation du psy
Avant l'âge de 2 ans
L'enfant et sa maman ont vécu en symbiose totale, période au cours de laquelle un attachement très important s'est tissé entre eux. L'enfant, même s'il a des frères et soeurs, sent bien cet attachement qui fait de lui un être unique et privilégié parmi tous les autres. Et c'est vers sa mère (qu'il s'agisse un petit garçon ou d'une petite fille) que l'enfant va se tourner et non vers le père. Là, tout dépend de l'attitude de la maman.
Deux possibilités :
- La première, elle surprotège son enfant ou manifeste un trop-plein d'affection, et dans ce cas l'enfant pourra s'y opposer et prendre son indépendance, soit au contraire en devenir dépendant en fusionnant un peu plus avec elle. Ce retour à la fusion originelle dont l'enfant était pourtant en train de se libérer va le replonger dans une confusion et une perte de distinction entre lui et sa mère. Et si sa maman le repousse ou s'en va, il est perdu ; abandonné par cette « moitié de lui-même ».
- La deuxième attitude est de « l'envoyer balader ». Et là, tout est dans la manière de le faire. Trop fort il va en souffrir, pas assez fort, il va retomber dans le premier cas. Tout est donc affaire de mesure.
Entre 2 et 6 ans
- Une nouvelle donne fait son apparition : le fameux complexe d'Oedipe qui va brouiller les cartes : le petit garçon et sa maman , la petite fille et son papa . L'un comme l'autre cherche à séduire le parent de sexe opposé, et chacun des parents objet de cet amour s'en trouve flatté, ce qui entretient le système. L'enfant peut alors être freiné dans sa démarche d'indépendance. A ce moment que le rôle de la mère est fondamental pour ne pas entretenir ce phénomène de dépendance. A la fois elle lui dit « ne sois pas dans mes jambes » et en même temps « ne fais pas cela, je vais le faire, tu es trop petit ». Il y a donc un paradoxe qui peuvent inquiéter, voire perturber l'enfant qui ne sait plus s'il doit faire ou ne pas faire, dépendre un peu plus ou un peu moins. Généralement il préfère se raccrocher à ce qui est la seule chose solide : les jupes de sa mère.
- La maman, le plus souvent, ne mesure pas ces contradictions, c'est l'entourage qui le lui fait remarquer cette attitude de surprotection . Elle peut la reconnaître ou l'ignorer. Dans ce dernier cas, elle préfère considérer que son enfant est finalement timoré, et va former avec lui une sorte de « bulle fusionnelle » où l'enfant trouve son compte, mais qui peut avoir des conséquences sur sa vie amoureuse future. C'est souvent l'intervention du père qui permet, doucement d'inciter la mère à lui « laisser un peu d'air ».
- Mais l'enfant n'est pas en reste de ce paradoxe : lui aussi peut à l'occasion d'un évènement extérieur réclamer avec insistance cet état de dépendance et de surprotection, alors même que les parents ne font rien pour l'entretenir. L'évènement en question peut être une absence ou un retard du père, ou la non présence de la mère à un moment que l'enfant jugeait comme crucial et dont les parents ne peuvent bien entendu mesurer la portée.
Pas simple tout ça !
Votre attitude
C'est essentiellement la « gestion du scotch » ! Il est scotché à vous, il faut savoir l'en décoller.
- Déléguer au conjoint, forcément moins impliqué, est un bon artifice à partir du moment où c'est fait sans que l'enfant puisse se sentir abandonné.
- Vous pouvez également utiliser votre propre enfant pour qu'il se déscotche. Il suffit de lui dire, par exemple : « viens m'aider, j'aurais besoin de tes dessins pour le travail que je suis en train de faire ». Dans ce cas, l'enfant se sent associé à votre activité (et donc non abandonné), et il se sentira plus responsabilisé, donc moins dépendant. Cela peut s'appliquer à des tas de points de la vie courante : vous lui donnez de la farine et de l'eau pour faire une boule pendant que vous faites la cuisine, vous lui demandez de porter certains aliments à sa taille durant les courses, il fait des dessins pendant que vous remplissez votre feuille d'impôts, etc. Evidemment cela demande une certaine disponibilité qui n'est parfois pas simple, en particulier quand il y a plusieurs enfants assez rapprochés. La tension peut alors monter et une petite promenade n'est alors pas superflu pour que tout le monde décompresse.
- Il est également important de mesurer les inquiétudes que peuvent générer les retards dans l'esprit de votre enfant. Si vous êtes en retard pour le chercher à l'école, il suffit de l'avoir souvent prévenu au préalable que s'il ne vous voit pas, il ne s'inquiète pas et qu'il vous attende à un endroit précis que vous avez défini ensemble.
La vie courante est pleine d'imprévus, et il faut de toute façon faire preuve d'inventivité pour passer cette période qui de toute façon ne durera pas très longtemps.
Les pièges
Le principal est la surprotection. Il est utile, dès le plus jeune âge, et en particulier vers l'âge de 8 mois, période des grandes peurs du bébé , de l'habituer avec beaucoup de douceur à la présence de tierces personnes. Cela l'aidera à créer par la suite son indépendance dans les jupes… de quelqu'un d'autre.
Valorisez-le dans ses activités : « je suis certaine que tu vas y parvenir ».
Dans ses activités, laissez-le expérimenter sous votre contrôle discret. Et s'il casse quelque chose, ce n'est pas la fin du monde…