Etude Nutri-Bébé SFAE 2013
L'étude Nutri-Bébé SFAE (Secteur français des aliments de l'enfance), effectuée en 2013 en partenariat avec le CREDOC (Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie), a montré qu'à partir de 12 mois le bébé est considéré à tort comme un adulte en miniature, avec une introduction trop précoce de certains aliments inadaptés. A cet âge, la part de l'alimentation spécifique aux bébés diminue rapidement, passant de 36% des apports journaliers entre 12 et 17 mois, à 8% entre 30 et 35 mois. En outre, c'est à 3 ans que bébé rejoint la table familiale et commence à consommer des aliments courants tels que les frites, les plats préparés pour adultes et les sodas.
L'étude constate ainsi :
- à partir de 1 an, plus de 80% des enfants ont des apports en lipides inférieurs aux apports moyens recommandés par l'EFSA (Agence d'évaluation de la sécurité des aliments), et 95% des apports en sel supérieurs à ces recommandations ;
- entre 2 et 3 ans, environ 75% des enfants ont des apports en fer insuffisants, et à environ 3 ans, presque 4 fois plus d'apports en protéines que nécessaire.
Pas assez de lipides
Les besoins lipidiques ou en matières grasses de l'enfant de 0-3 ans sont 3 à 5 fois plus élevés que ceux de l'adulte. Les lipides sont indispensables pour l'enfant car ils constituent à la fois une source d'énergie importante et une contribution à la construction des membranes cellulaires, et par conséquent participent au développement du
système nerveux central.
La « lipidophobie » incite, par exemple, les parents à proposer à leur enfant du lait demi-écrémé de façon trop précoce et à ne pas ajouter de matières grasses dans leurs préparations maison. Cette pratique se traduit par une insuffisance d'apports à la fois quantitative et qualitative. L'énergie n'étant pas apportée par la consommation de lipides, elle est alors compensée par une consommation plus importante de protéines et de
sucres.
L'acide linoléique (présent dans quasiment toutes les huiles végétales) et l'acide alpha-linolénique (présent principalement dans les poissons gras, l'huile de lin, de chanvre et de colza) sont deux
acides gras indispensables, précurseurs d'autres acides gras polyinsaturés essentiels. L'apport d'acide linoléique, principal représentant des acides gras polyinsaturés oméga 6, évolue à l'inverse des besoins : alors que les besoins en acide linoléique sont croissants avec l'âge, les apports moyens diminuent de manière continue après le 4ème mois.
Trop de sel
Les apports en
sodium augmentent de manière continue avec l'âge. Entre 15 jours et 3 mois, l'apport journalier en sodium s'élève à environ 170 mg/j pour atteindre 1200 mg/j à 3 ans.
Si les mamans font attention à ne pas ajouter de sel quand elles réalisent elles-mêmes la préparation des repas, elles n'ont pas
conscience qu'une part de pizza ou de quiche du commerce est extrêmement salée. De même, l'étude montre que le lait de vache, le fromage, le pain et les biscuits, gâteaux et viennoiseries sont également des aliments qui contribuent fortement aux apports en sodium de l'enfant.
Les effets de l'excès de sodium sont comparables aux effets de l'excès de protéines : les enfants consomment
trop de sodium par rapport aux besoins de leur organisme. Cet excès est éliminé par le
rein qui se trouve sollicité de façon excessive. Il est par ailleurs vraisemblable qu'un enfant qui reçoit une
alimentation trop salée dès son plus jeune âge aura tendance à manger salé à l'âge adulte. Si les conséquences sur la santé de l'enfant sont encore mal connues, les risques cardiovasculaires liés à une consommation excessive de sodium sont, en revanche, bien établis chez l'adulte.
Déficit en fer
Dans l'organisme, le fer joue un rôle majeur dans la fabrication et le fonctionnement de l'hémoglobine, une protéine constitutive des
globules rouges qui véhicule l'oxygène depuis les
poumons jusqu'aux cellules. Le fer entre également dans la constitution de la myoglobine, protéine responsable de l'oxygénation des
muscles. Chez le nourrisson, les besoins en fer sont particulièrement importants. Quel que soit l'âge, l'absorption digestive du fer est peu élevée, de l'ordre de 10 à 15% (voire moins s'il s'agit du fer non héminique présent dans les végétaux, les œufs et les produits laitiers). Des apports de 6 à 10 mg/j sont nécessaires jusqu'à 10 ans pour couvrir des besoins de 1 à 2 mg/j.
Le déficit en fer, tout comme l'excès de protéines et la dette en lipides, résulte le plus souvent de l'abandon des laits infantiles et du passage au lait de vache chez des enfants qui consomment, par ailleurs, peu de viande et d'oeufs. Un pourcentage trop élevé d'enfants français de moins de 3 ans a des apports en fer au-dessous des apports recommandés. En pratique, cette insuffisance d'apports est rarement responsable d'une véritable
anémie chez des enfants bien portants. Les travaux réalisés sur le sujet montrent que ce déficit en fer peut être responsable d'un moins bon développement psychomoteur notamment sur le plan cognitif, d'infections plus fréquentes et peut éventuellement être associé à un ralentissement de la croissance.
Excès de protéines
L'excès de protéines existe dès les premières semaines de vie. Il augmente au moment de la diversification, au point de dépasser largement les apports dits « de sécurité ». Cet apport excessif est inutile pour la croissance ou la santé de l'enfant. Il pourrait même avoir un effet néfaste sur le rein dont il augmente le travail d'élimination de façon évidente.
Les apports de sécurité en protéines conseillés par l'EFSA (Agence d'évaluation de la sécurité des aliments) sont de 8 g/j entre 0 et 3 mois et vont jusqu'à 11,5 g/jour entre 24 et 35 mois. Entre 0 et 3 ans, les apports protéiques doivent notamment assurer le renouvellement cellulaire, permettre le développement de la masse musculaire ainsi que la croissance squelettique. Ils doivent donc permettre l'accroissement programmé de la taille et du poids, sans dépasser les capacités hépatiques et rénales d'élimination des déchets. Si un plus grand recul est nécessaire pour pouvoir conclure quant à l'incidence d'un régime riche en protéines sur la santé, certaines études associent cependant les excès alimentaires protéiques chez l'enfant à des risques ultérieurs de surpoids et d'obésité.
Lors de la diversification alimentaire, plusieurs facteurs contribuent à augmenter les apports en protéines : les enfants qui commencent à consommer du lait de vache ont un apport protidique trop important puisqu'il contient en moyenne à 3,2g de protéines pour 100g (lait entier, UHT), soit bien plus que le lait 2ème âge (en moyenne à 1,66g pour 100g), ou le lait de croissance (2,02g pour 100g) qui sont parfaitement adaptés aux enfants. Parallèlement, les enfants français consomment souvent beaucoup de laitages et fromages qui sont des aliments intéressants pour leurs apports calciques mais qui sont aussi riches en protéines. Enfin, la consommation assez importante de viande et surtout de charcuterie, comme le jambon, riche en sel et en protéines, vient encore renforcer cet excès.
Conseils
- Jusqu'à 6 mois, ou au moins jusqu'à 4 mois si possible
Privilégier l'allaitement maternel. Si la maman ne souhaite pas ou ne peut pas llaiter, seuls les laits infantiles sont recommandés.
- Au cours de la diversification
• Utiliser des préparations de suite ou lait 2ème âge spécifiquement conçus pour couvrir les besoins nutritionnels et physiologiques des enfants entre 6 mois et 1 an, lorsque l'enfant n'est pas allaité ou en relais du
lait maternel.
• Favoriser l'utilisation du lait de croissance à partir d'1 an et le plus longtemps possible à raison de 2 biberons par jour le matin et au goûter.
• Privilégier les laitages les moins protéinés afin d'apporter autant de
calcium avec moins de protéines. L'utilisation des préparations lactées infantiles permet de réduire l'apport en protéines de façon importante par rapport à des aliments non spécifiques.
• Préférer la viande, le poisson ou les oeufs à la charcuterie (dont jambon) trop riche en sel, en protéines et pauvre en fer.
• Ne donner les denrées riches en protéines (viande, poisson ou oeuf) qu'à un seul repas par 24 heures.
• Proposer du poisson deux fois par semaine et utiliser des huiles riches en oméga 3 (huile de colza, de noix) pour apporter les lipides nécessaires à la croissance et au développement de l'enfant et varier les matières grasses (huiles, beurre, crème).
• Ne pas proposer de plats préparés pour adultes. Leur préférer les plats spécifiquement conçus pour les enfants, toujours moins riches en sel.
• Déculpabiliser en cas de manque de temps pour préparer un repas maison. Les aliments spécifiques pour bébé constituent un choix de qualité. Ils apportent la juste dose en protéines, lipides (dont acides gras essentiels), sel et textures adaptée à l'âge de l'enfant.
• Demander conseil au médecin lors des visites en cas de doutes ou d'interrogation.