Point de départ
Vous vous posez souvent bien des questions sur ce qu'il faut faire et ce qu'il faut éviter. Selon votre culture, votre passé, votre tempérament, vos lectures (souvent contradictoires), vous hésitez entre deux attitudes extrêmes, l'une empreinte de rigueur (c'est moi qui commande) et l'autre de laisser-faire (il faut qu'il s'exprime). Et vous trouvez autour de vous des parents, des mais, des médecins aussi parfois, qui, parce qu'ils vous connaissent mal, vont, sans le vouloir, vous culpabiliser. A une mère qui lui demandait, à propose de son enfant : « Que faut-il donc faire ? », Freud répondit : « Ne vous en faites pas, de toute façon vous ferez mal ! ».
Laissez dire et ne vous culpabilisez pas. Françoise Dolto, qui a beaucoup écrit et parlé à propos de l'éducation des enfants, a été mal interprétée tout autant par ses supporters que par ses détracteurs, et les parents se sont sentis coupables. Or son message, l'essentiel de son message, était simple : l'enfant, dès sa naissance, est une personne qui a besoin d'être aimée et reconnue. Il a besoin de comprendre. Il a peur de l'abandon, de la complexité du monde, il est angoissé de son impuissance et de sa dépendance.
Votre enfant a les mêmes craintes, les mêmes aspirations que vous, mais, parce qu'il est inachevé, il les exprime différemment. Il n'y a pas lieu de faire de l'éducation un débat idéologique. Il n'y a pas de recette éducative, tout au plus quelques idées-forces à méditer. Il a besoin de vous. Accompagnez-le.
L'éducation commence à la naissance
Sans doute, dans les premiers mois, l'enfant a-t-il surtout besoin que soient satisfaits sa faim, sa propreté, son sommeil. Mais il ressent très tôt l'amour qui lui est donné au cours du repas, du bain, du jeu. Il vous entend parler (et il est important que vous lui parliez). Il perçoit, à votre attitude, à l'intonation de votre voix, à vos gestes, la satisfaction ou l'insatisfaction, le bonheur ou l'angoisse, le calme ou l'énervement. À toutes ces perceptions, il réagit à sa manière : pleur, sourire, détente, agitation. Cet échange permanent est très important car il transmet le message essentiel : « Tu es aimé. »
Très vite, vous serez amené à exercer l'autorité, non pas par principe mais par nécessité : pour le protéger, vous serez conduit à adopter des attitudes qui le contrarient. Et c'est de la même manière dont vous allez exercer cette autorité dès les premiers mois et les premières années que vous allez, vous-même, édifier votre propre système éducatif.
L'autorité n'est pas la contrainte
Faire acte d'autorité, c'est fixer des limites. Contraindre, c'est obliger, forcer, et ce n'est pas du tout la même chose. Très tôt, vous serez amené à exercer votre autorité, et ce sera probablement à propos de la première manifestation d'opposition : le refus d'un repas. Si vous tentez de le forcer, vous exercez une contrainte qui, immanquablement, va renforcer son opposition. Si vous lui offrez autre chose que, sans doute, il préfère, vous cédez à ce qui est un caprice : votre autorité est en défaut. Si, au contraire, vous interrompez le repas sans vous fâcher, en gardant votre calme et votre sourire, si vous passez à une autre activité en attendant l'heure du prochain repas, vous avez fixé des limites, vous avez fait acte d'autorité avec sagesse. Cela vous sera bénéfique et à lui aussi.
Par ce type d'attitude, vous vous rendez compte progressivement (et lui aussi) que l'Amour et l'Autorité ne sont pas contradictoires mais complémentaires. L'éducation est faite de l'addition, de l'intrication des deux.
La fermeté
Faut-il gronder, punir,( donner une fessée est devenu obsolète !!!) ? Bien sûr, c'est parfois nécessaire, ne serait-ce que pour écarter certains dangers. Mais il ne faut pas que ce soit permanent, inévitable. La punition, qu'elle quelle soit n'a de chance d'être efficace que si elle est suffisamment rare pour être exemplaire ; sinon elle deviendra très vite une habitude subie par l'enfant qui n'en tirera aucun bénéfice.
Etre ferme, c'est savoir refuser. L'enfant, c'est sa nature, veut obtenir tout, tout de suite : c'est normal. Tout ce qui est nouveau, tout ce qui brille, tout ce qui se mange est source de convoitise. Pourquoi ne le réclamerait-il pas ? Or il faut savoir agir avec souplesse : donner parfois tout de suite, faire attendre souvent l'objet convoité, refuser franchement si c'est nécessaire… la frustration est un des éléments de la construction . Mais il faut garder le sourire et expliquer le pourquoi du refus ou de la punition. Pourquoi vouloir expliquer ce qu'apparemment il ne peut comprendre ? D'abord parce que, peut-être, il comprend mieux que vous ne le pensez. Ensuite, parce que vous prendrez ainsi l'habitude de commenter, d'expliquer : pour l'instant, ce dialogue est à sens unique ; mais, un jour, votre enfant posera des questions. Vous serez mieux préparé pour y répondre.
La récompense, le don gratuit
Il y a plusieurs façons de récompenser. La récompense accordée « sous conditions » n'est certainement pas la meilleure formule. (Le « tu auras un jouet si » n'est pas à conseiller.) Elle relève d'un système trop rigide : bonne action = récompense / mauvaise action = punition. Mieux vaut éviter ce système de réflexe conditionné. Il est de beaucoup préférable que la récompense soit vécue par l'enfant comme un acte spontané (et non le bénéfice d'une négociation) venant de quelqu'un qui lui témoigne ainsi, de façon tangible, son affection. La récompense à distance de la bonne action, offerte de façon inattendue, est un don merveilleux.
Mais on peut aussi faire plaisir « sans raison ». Simplement parce qu'on aime son enfant. Cet objet, ce jouet, ce moment de joie qu'on lui propose de façon totalement gratuite doit avoir sa place dans son éducation. Le don gratuit est une joie que vous ne devez pas vous refuser et lui refuser.
Quelques conseils à méditer
Ce qu'il faut éviter :
refuser tout, toujours,
donner tout, tout de suite,
perdre son calme.
Ce qu'il faut essayer :
donner quand il n'attend pas,
modérer ses impatiences,
garder le sourire.
La meilleure preuve d'amour que l'on puisse donner à un enfant c'est savoir lui dire NON